Un rapprochement inquiétant entre l’Iran et l’Égypte

Le rapprochement inattendu entre l’Iran et l’Égypte suscite des interrogations sur les motivations cachées de ces deux pays, profondément divisés par des conflits historiques. La visite récente du ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, au Caire a marqué un tournant dans leurs relations, qui ont longtemps été marquées par une rivalité exacerbée.
L’Égypte, alliée traditionnelle des États-Unis et signataire des accords de Camp David avec Israël en 1978, avait rompu tout contact avec l’Iran après la révolution islamique de 1979. Cette rupture a été exacerbée par le soutien égyptien au shah déchu Mohammad Reza Pahlavi, qui a trouvé refuge en Égypte avant de mourir en 1980. Le conflit entre l’Iran et l’Iraq (1980-1988) a encore aggravé les tensions, avec le Caire soutenant Saddam Hussein, perçu par Téhéran comme un ennemi.
Cependant, des signes de rapprochement ont émergé récemment. Le changement du nom d’une rue au Caire en l’honneur de Hassan Nasrallah, leader du Hezbollah tué en 2024, a été interprété comme un geste symbolique pour réparer les tensions passées. Les discussions entre le président égyptien Abdel Fattah el-Sisi et Araghchi ont abouti à des accords sur une coopération politique régulière, un premier pas vers une normalisation.
Cette détente s’explique par des intérêts économiques communs : la crise du canal de Suez, affecté par les attaques houthies, a poussé l’Égypte à chercher l’influence iranienne pour stabiliser le trafic maritime. L’Iran, lui, cherche à renforcer sa légitimité régionale face aux pressions internationales et à son isolement croissant.
Cependant, des divergences fondamentales persistent. Le Caire reste ancré dans ses relations avec Israël, un partenaire indispensable pour l’énergie, tandis que l’Iran soutient le Hamas, groupe considéré comme une menace par l’Égypte. Ces tensions montrent que le rapprochement est plus un calcul stratégique qu’un réel rapprochement idéologique.
En dépit des efforts diplomatiques, la complexité des intérêts nationaux et les conflits d’idées entre les deux pays rendent improbable une coopération durable. Leur relation reste fragile, marquée par des compromis éphémères plutôt qu’une alliance solide.