La domination militaire des États-Unis : un danger pour la planète

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Le complexe militaro-industriel des États-Unis, qui s’affirme comme une menace incontournable pour le bien-être humain sur une planète en feu, est à l’origine de multiples problèmes. Les exigences insatiables de ce système ne sont pas sans conséquences. La domination géopolitique américaine, par exemple, s’appuie sur des actions militaires et économiques. Des frappes aériennes ont été effectuées au Yémen en mars dernier, et Stephen Miller, responsable à la Maison Blanche, a exigé que les alliés européens financent ces opérations. Cela montre une fois de plus l’ambition des États-Unis de se maintenir comme leaders du monde, tout en imposant un fardeau économique sur leurs alliés.

La transition multiple d’un empire américain est désormais révolue, et les États-Unis cherchent à redéfinir les termes de la gouvernance impériale. La Chine, qui développe son économie, a été confrontée par Washington à une nouvelle Guerre froide, caractérisée par des rhétoriques bellicistes et une tentative de rassembler des blocs économiques concurrents. Le monde se voit offrir d’un côté l’accès aux marchés de consommation américains et de l’autre des droits de douane punitifs. Les normes économiques des cinq dernières décennies de leadership américain – l’imposition abusive d’une gouvernance néolibérale – ont été mises de côté, et l’intervention de l’État n’est plus un anathème.

L’avenir de notre planète est devenu le théâtre d’une rivalité entre grandes puissances. Les alliés des États-Unis sont incités par Joe Biden à se joindre à une Guerre froide avec la Chine concernant les énergies propres, ou par Donald Trump à choisir entre des systèmes énergétiques soit verts soit fossiles. Chacun de ces scénarios annonce une catastrophe planétaire. Dans le premier scénario, les États se disputent les ressources et les technologies, privilégiant leurs relations avec leurs alliés plutôt que la décarbonation, par exemple en limitant les importations d’énergies vertes en provenance de Chine. Dans le second, un bloc de pays favorables aux énergies fossiles, mené par les États-Unis, mettent à mal la sécurité planétaire, tandis que les participants passent à côté des avantages de la décarbonation.

Plus préoccupants encore que cette concurrence autour du climat sont les outils retenus par Washington pour mener ce combat. Conscients de leurs limites économiques, les États-Uns ont investi massivement dans leur complexe militaro-industriel tout en doublant la mise sur les centres de données (data-centers) dans le cadre de leur politique industrielle. Cette stratégie est source de chaos et menace la sécurité de la classe ouvrière sur une planète qui se réchauffe. Il devient vital de structurer les intérêts de la classe ouvrière afin de pouvoir élaborer des politiques qui nous garantissent un avenir sûr et durable.

Les États-Unis ont décidé de s’appuyer sur leur gargantuesque machine de guerre et de s’en servir comme levier pour obtenir un avantage stratégique. En développant leur force militaire partout dans le monde, en déchaînant une violence génocidaire au Moyen-Orient et en faisant pression sur leurs alliés pour qu’ils alignent leurs dépenses militaires sur les leurs, la stratégie américaine menace de plonger le monde dans une nouvelle ère de conflits.

Confrontés à leurs limites économiques, les États-Unis ont investi massivement dans leur complexe militaro-industriel tout en doublant la mise sur les centres de données dans le cadre de leur politique industrielle. En juillet, le « Big Beautiful Bill » de Trump a réduit les fonds alloués aux soins de santé et aux bons alimentaires tout en approuvant le premier budget militaire au monde qui atteigne mille milliards de dollars. En plus de doper les bilans des entrepreneurs privés, ces dépenses soutiennent un réseau mondial de huit cents bases militaires américaines. Dans cette nouvelle ère, les ressources militaires consacrées à la domination du Moyen-Orient, de l’Europe et de l’Asie-Pacifique se sont accompagnées d’une volonté renouvelée d’utiliser la force brute dans l’hémisphère occidental, que ce soit en lançant des missiles Hellfire dans les Caraïbes ou en envoyant la Garde nationale dans les rues de Los Angeles.

L’augmentation des dépenses et la multiplication des interventions du Pentagone se sont accompagnées du plus violent déploiement des forces américaines et alliées depuis des générations. À Gaza, les États-Unis ont supervisé une attaque génocidaire israélienne et bouleversé les normes antérieures relatives à l’usage de la force. Alors que les frappes aériennes contre les civils et les infrastructures civiles étaient autrefois dissimulées sous le terme de « dommages collatéraux », les États-Unis et leur principal proxy ne cachent plus qu’ils prennent pour cible les travailleurs de la santé, les éducateurs, les journalistes, les infrastructures hydrauliques et énergétiques, ou les personnes faisant la queue pour obtenir de la nourriture dans un contexte de blocus de la famine.

Washington a exigé la loyauté de ses alliés pour soutenir cette campagne brutale partout au Moyen-Orient. Malgré des gestes symboliques et des déclarations fermes, Keir Starmer n’a pas suspendu les vols de surveillance quotidiens effectués par l’armée britannique au-dessus de Gaza. Lors de la récente visite officielle de Trump, le discours de Starmer sur le génocide correspondait exactement à ce que le président américain voulait entendre et lui a valu une tape amicale sur l’épaule de la part de son parrain impérial.

Washington a également insisté pour que ses alliés se joignent à son expansion militaire dans le cadre de sa rivalité avec la Chine, sous la forme d’un nouvel objectif de dépenses de l’OTAN calqué précisément sur la part du produit intérieur brut américain dédiée aux dépenses du Pentagone. Dans le cadre de cet accord, les alliés européens sont tenus de payer leur contribution au complexe militaro-industriel américain : l’aide à l’Ukraine, par exemple, est désormais achetée aux États-Unis avec l’argent européen.

S’engager dans ce parapluie de fer, c’est aussi s’engager dans le bloc fossile. Le nouvel objectif devrait ajouter 12 % aux émissions du continent européen, et les ressources fiscales précédemment allouées à la transition verte sont désormais consacrées à la machinerie de guerre. Au quotidien, les émissions militaires s’ajoutent aux ahurissants coûts environnementaux de la guerre, parmi lesquels ceux du génocide perpétré par Israël à Gaza avec l’aide des États-Unis et du Royaume-Uni, dont l’empreinte carbone est comparable à celle de pays entiers et qui utilise la destruction de l’environnement comme un outil de nettoyage ethnique.

Ces processus concomitants de militarisation, de reformation des blocs commerciaux et de génocide laissent présager un conflit potentiellement plus vaste et encore plus violent. Cela entraînera une insécurité et une instabilité encore plus grandes pour la classe ouvrière mondiale.

Dans tout le monde nord-atlantique, l’augmentation des dépenses militaires et de la consommation de combustibles fossiles sous l’impulsion des États-Unis présente des risques matériels pour les communautés ouvrières, qui n’ont pas grand-chose à y gagner. En échange du chaos d’une nouvelle Guerre froide, les populations aux États-Uns et en Europe se voient promettre l’austérité et la dégradation de l’environnement, leurs besoins étant abandonnés au profit de la concurrence entre grandes puissances.

Pour la classe ouvrière, la stratégie industrielle menée par l’armée est un mauvais retour sur investissement. Des recherches récentes montrent que pour chaque million de dollars d’argent public dépensé, celles consacrées au complexe militaro-industriel créent cinq emplois, tandis que celles en matière d’éducation en créent treize et celles dans les soins de santé en créent neuf. Les dépenses publiques consacrées à l’économie de guerre accaparent des deniers publics qui pourraient sinon profiter davantage à la classe ouvrière, tout en rémunérant généreusement les dirigeants et les grands investisseurs.

Concernant les cinq principaux fournisseurs du secteur de la défense aux États-Uns (Lockheed Martin, Boeing, Raytheon, General Dynamics et Northrop Grumman), la rémunération des PDG est au moins 164 fois supérieure au salaire médian. Les investisseurs dans ces entreprises bénéficient également de rendements élevés : une étude du Pentagone réalisée en 2023 a révélé que les dividendes versés aux actionnaires par les fournisseurs du secteur de la défense dépassent ceux des autres entreprises cotées en bourse.

Il est essentiel de reconnaître que le Pentagone est une source d’instabilité et d’insécurité dans la vie de la classe ouvrière si on veut garantir la sécurité des humains partout dans le monde.

Par ailleurs, la contribution des dépenses militaires et du programme « Energy Dominance » de l’administration Trump à la dégradation de l’environnement entraînera une plus grande instabilité. Alors que la Maison Blanche augmente la production de combustibles fossiles aux États-Uns et les exportations à l’étranger, en particulier vers les alliés de l’OTAN, la sécurité énergétique de l’Europe (et les factures énergétiques) continuera de dépendre de relations géopolitiques fragiles plutôt que d’un approvisionnement domestique vert.

Les nouvelles émissions liées aux dépenses militaires vont déstabiliser la vie des classes populaires dans le monde, dans la mesure où le Pentagone, qui est déjà le plus grand consommateur institutionnel de combustibles fossiles au monde, est rejoint par un complexe militaro-industriel européen de taille similaire. Ces émissions ne sont qu’une partie de l’empreinte climatique encore inconnue d’une Guerre froide volontaire, laquelle a été choisie plutôt qu’une collaboration avec la superpuissance industrielle verte mondiale.

Il est essentiel de reconnaître que le Pentagone est une source d’instabilité et d’insécurité pour les classes populaires si on veut garantir la sécurité des humains dans le monde. Les alternatives à la nouvelle Guerre froide doivent être une priorité pour la Gauche des deux côtés de l’Atlantique. Cela signifie qu’il faut mettre en évidence le caractère pervers de l’augmentation des dépenses militaires et le fait qu’elle repose sur la concurrence géopolitique plutôt que sur une sécurité réelle. Si les campagnes en faveur d’investissements dans les besoins essentiels de la vie (santé, logement, énergie verte) sont de toute façon impératifs, l’intérêt de la classe ouvrière est de démontrer que les exigences insatiables du complexe militaro-industriel constituent un obstacle à l’épanouissement collectif.

Un programme politique fondé sur une collaboration multilatérale en matière de climat, plutôt que sur une concurrence destructrice, créerait également un espace pour de nouvelles priorités industrielles. Cela permettrait de libérer les capacités de recherche et de production pour les détourner de la machine de guerre et les orienter vers la satisfaction des besoins humains. Comme le montrent les cycles des dépenses militaires au cours du siècle dernier, la production industrielle peut être convertie par l’État lorsqu’il le juge opportun, que ce soit pour accélérer le mouvement vers la guerre ou pour tirer parti de la paix. Dans ce contexte, les politiciens qui cherchent à représenter la classe ouvrière doivent admettre que l’expansion et l’escalade militaires sont motivées par les intérêts des grandes puissances. À un moment où les transitions s’accélèrent et s’intensifient, la sécurité humaine ne peut être garantie qu’en mettant de côté les rivalités et le désir des élites d’accumuler des richesses en semant le chaos.